Bonjour à vous.
Je constate que j'ai un lecteur fidèle, qui se prenomme Paul. Ca ne m'etonne pas trop, car on dial regulierement via msn.
Par contre lui est semble-t-il surpris de lire ce que je peux ecrire sur ces pages: tant mieux, j'aime bien surprendre, et je me rend compte, que meme si on peut dial des mois avec quelqu'un, il reste toujours des éléments à découvrir sur la personnalité et l'hsitoire de chacun.
Je tiens aussi à remercier Eau Sauvage, qui a fait un détour par mon blog.
Voilà pour les remerciements de ce jour lol.
Cependant, mon passage ici ce jour a un autre objet: je souhaite relater un des moments le plus dur que j'ai eu a passer sur cette terre jusqu'à ce jour. Ca ne va pas être gai à lire, alors pour ceux qui sont dejà plus ou moins deprimés, je vous conseille de ne pas aller plus loin, et je vous souhaite une magnifique journée...
Tout a commencé un 23 Février.
Ce jour là, en général est jour de fête pour moi, car c'est la date anniversaire de ma soeur ainée. Comme chaque année, nous passons ce jour en sa compagnie, en province, avec une bonne partie de la famille. L'an passé, nous étions réuni en petit comité, famille proche, ma mère, mes soeurs et conjoints.
Nous avons passé la journée à nous divertir et, sous les coups de 19h, nous avons tous repris la route afin de rejoindre nos domiciles respectifs.
Pour le trajet, nous avons uniquement de l'autoroute, et comme je venais de changer de voiture, nous avons un peu testé ce qu'elle avait dans le ventre...
Une fois rentré, j'ai passé une partie de la soirée devant la tv (ben oui ca m'arrive aussi...) et mon ami s'est connecté sur le net. Je débranche mon portable... histoire de passer une soirée tranquille, puis décide d'aller me coucher...
Mon ami décide d'en faire autant, et au moment ou il coupe son PC, le téléphone sonne. Minuit passé. Je me dis, tiens un contact croisé sur un chat quelconque nous tel... Afin d'en savoir plus, je descend rejoindre mon ami, et là, la nouvelle tombe: ma mère au bout du fil, nous apprenant la mort de ma tante.
Impossible pour moi de parler à ma mère. Sous le choc, je remonte me coucher. Je n'en crois pas mes oreilles. Je ne réalise pas. Mon ami vient me rejoindre et quelques minutes plus tard je reprend mon téléphone, et appelle ma mère. personne chez elle. J'appelle son portable, ma petite soeur répond en larmes. Elles se sont rendues chez mon oncle. Y sont présents mon cousin, qui venait juste d'etre papa quelques mois plus tot, et ma cousine. Je demande à en savoir plus sur le décès: Accident de voiture, tuée sur le coup. Là j'ai encore plus mal... on venait de faire le retour à fond la caisse, et c'est ma tante qui disparait dans un accident de voiture, alors qu'elle n'etait pas du style a dépasser les limitations de vitesse. Tout cela sur le banal chemin de son job à son domicile, meme pas 10 minutes de trajet.
Voilà tout ce que l'on sait, tout ce que les gendarmes ont dit.
Je n'ai pas pu fermer l'oeil de la nuit. J'ai téléphoné plusieurs fois à ma mère pour savoir comment elle allait... Comme un imbécile... Comment pouvait elle aller??? Dans mon cas, j'ai ressenti le besoin d'en parler à d'autres, d'en informer ceux qui m'entourrent. Je me sentais isolé, les yeux plein de larmes...
Et puis il y avait mes grands-parents, dormant gentillement... ignorant tout... Dès le lendemain les journaux locaux en feraient leur "une", fallait pas qu'ils l'aprennent de cette façon.
Mes grands-parents ont une infirmiere qui vient plusieurs fois par semaine s'occuper d'eux. Ma mère et mon oncle l'ont contacté dès que possible, afin qu'elle se rende avec eux chez eux le lendemain matin. C'est sous médicaments et calments qu'ils ont appris la nouvelle. On leur subtilise le journal pour qu'ils ne voient pas de photos de l'accident.
Inconcevable.... Tout cela parait inconcevable....
Ayant à peine réussi à fermer l'oeil de la nuit, dès 8 heures, n'y tenant plus, je téléphone à ma soeur, dont on venait, la veille de fêter son anniversaire.
Elle le sait... Dès la première seconde de téléphone je l'entend sanglotter.. Elle est dejà sur la route, se rendant chez mon oncle. Elle me rappelle peu de temps après, me disant que l'atmosphère y est insoutenable... tout le monde est sous anti depresseur, sous le choc, tout le monde pleure...
Le corps n'est pas visible à cet instant. Il faut aller à la chambre mortuaire donner des vetements pour habiller le corps. Ma soeur s'en charge. C'est insoutenable pour elle d'ouvrir des armoires et de choisir une tenue avec mon oncle, pour habiller sa femme. Enfin, elle se rend à la morgue, dépose les vetements, mais toujours pas possible de voir le corps.
Mes grands parents aussi sont effondrés. Perdre un enfant... Ca parait insupportable...
De mon coté, je passe une bonne partie de la journée à pleurer. Lorsque je previens ceux qui m'entourrent et qui ont connu ma tante, ils n'en croient pas leurs oreilles, et se mettent aussi à pleurer...
Le même soir, on avait des amis à diner. D'un commun accord avec mon ami, on les previent que l'ambiance ne sera pas bonne, mais on décide de les recevoir tout de meme: ca nous fera du bien.
Durant la soirée, passant encore un peu de temps au telephone avec ma soeur, j'ai vécu un moment que je n'arrive pas à qualifier... Nous etions 4 autour de la table ronde, soirée fondue bourguignone de prévue. Un patio entoure une partie de notre maison. A un moment j'ai apercu ma tante, se tenant dans le patio. Comme un flash. Aussitot, j'en ai fait part à la collectivité. C'etait tellement irreel. Elle se tenait, dans un habit de lumiere, à quelques metres de moi. Et là j'ai compris. J'ai compris que pour elle s'en etait terminé. J'ai compris au plus profond de mon coeur un message, un message d'amour, comme si elle passait au dessus de mon malheur, me disant au revoir, et elle semblait heureuse, soulagée...
Ca a été pour moi un autre choc. Comme une lumiere. Dès cet instant j'ai dit à mon ami: demain matin, au bureau je m'organise pour etre absent le restant de la semaine. Il faut que je me rende auprès des miens avant l'enterrement. Ils ont besoin de moi. Je venais de la voir, resplendissante, et je me devais de soutenir les miens.
Décision prise, le lendemain je retournais en province, auprès de ma famille, que j'avais quitté meme pas 48 heures plus tot.
Mon premier passage, je l'ai fait chez mes grands parents. Ils m'ont recu en larmes. Un autre de mes oncles etait présent, et meme s'il etait tard, souhaita m'accompagner à la morgue.
Juste avant de partir, nouveau fait etrange: mes grands parents ont des volets que l'on remonte ou descend avec des chaines. D'un seul coup, les 3 volets du séjour se sont fernés, sans explication, personne a proximité... Nous en etions stupéfaits. Jamais une chose pareille s'est produite.
Nous nous rendons à la morgue. Sur le chemin, mon oncle me dit que le corps est visible seulement depuis 17h cet apres midi... soit pres de 48 h apres l'accident.
A mon arrivée, ma mere, mon oncle, cousin et cousine sont présents. Ils m'accueillent en larmes, contents que j'ai pu venir si vite. Je rentre dans la chambre mortuaire avec mon oncle, et là je vois un corps recouvert jusqu'à la taille, dans un cerceuil. Je suis en larmes, mon oncle aussi.
Je m'approche, remarque qu'elle n'est pas coiffée comme d'habitude. Je la regarde intensément. Puis, pris d'un élan de lucidité, je comprend que ce n'est pas ma tante que vois, tout du moins pas celle que je vois depuis tout petit. Il ne reste qu'un corps... L'esprit s'en est déjà allé...
Une fois ce fait acquis, j'en fait par à mon oncle. Il semble surpris. Je rejoind le restant de ma famille à l'exterieur de la chambre mortuaire. J'essaie d'etre fort face à ceux qui ont perdu une femme, une maman, une soeur. Moi j'ai la chance de conserver cet arbre familial autour de moi. Mon rôle consiste à les réconforter, à les entourer, car ils sont si vulnérables à ce moment là.
Nous passons tous la soirée ensemble, chez mes grands parents. Personne doit rester seul, pas maintenant.
Le lendemain on se retrouve entre cousin-cousine pour faire l'acquisition d'une plaque en mémoire de notre tante. On passe encore de nombreux moments à la morgue, mais pour moi ce n'est plus insurmontable comme ca l'a été. J'achète des fleurs pour égayer un peu la chambre motuaire. J'ai toujours le vase acquis ce meme jour, que je conserve comme s'il avait une valeur inestimable. J'achete aussi des chemises, noires, que je n'avais pas emportées.
Ce meme jour ma grand mere s'est rendu pour la derniere fois à la morgue, pleurer sa fille. Mon grand pere lui a l'air déconnecté...
Mon ami est venu me rejoindre la veille au soir, pour partager notre douleur et nous accompagner dans cette epreuve. Il n'a pas souhaité voir une derniere fois ma tante, voulant conservé l'image qu'il en avait, alors il s'occupe de ma petite soeur...
Le lendemain fût bien plus difficile.
Nous nous rendons tous de bonne heure à la morgue. La mise en biere est prévue en fin de matinée. Nous disons tous au revoir à ma tante... c'est tres éprouvant. Ma soeur ainée qui n'habite pas a proximité est venue, sur mon conseil, avant la mise en biere. Elle ne tenait pas à voir notre tante sans vie. J'ai réussi à la convaincre, comme une de mes cousines. Cest la première fois que nous voyons la mort en face. Jamais auparavant nous ne sommes passés par de pareils moments. C'en est terminé des fêtes que l'on pouvait faire tous ensemble lors des noels, anniversaires, mariages. A partir de ce jour, plus rien ne fut comme avant.
Juste avant la mise en biere, on pleurait tous.
Et voilà que les Pompes Funèbres arrivent, un dernier au revoir avant qu'ils ne referment le cerceuil. Mon oncle y depose les fleurs, des lys blancs, que j'avais acheté la veille. Les tourne-vis retentissent lorsqu'ils ferment à jamais le cerceuil.
Moment de frisson.... C'en est fini.
A partir de ce moment nous n'avons plus qu'en face de nous un cerceuil, orné d'une croix et d'une plaque. Ceux qui n'avaient pas voulu voir le corps entre dans la piece et se receuillent. Moi j'en sors.
Nous quittons les lieux, histoire de manger un bout avant la messe et l'enterrement.
A 14h on se retrouve pour former le convoi mortuaire.
L'entrée dans l'église me donne encore un frisson aujourd'hui...
Une fois qu'on a atteint le seuil de l'eglise, je marche d'un coté du cerceuil, mon cousin, de l'autre, jusqu'à l'autel.
La messe est longue... Tout cela me parait irreel, ayant pris un Lexomil juste avant. Je vois des visages connus, d'autres qui ne le sont pas. Je me dis "ils sont venus", venus dire un au revoir. En sortant de l'eglise, je m'effondre dans les bras d'une amie de la famille. Je l'avais revu quelques mois plus tôt, à l'occasion d'un mariage... Comme le monde est cruel...
Arrivé au cimetierre, me voilà en train de porter le cerceuil. Mon cousin m'annonce " tu sais, maman t'aimait comme si tu etais son fils. Elle voulait toujours qu'on prenne exemple sur toi". J'ai du mal a porter le cerceuil jusqu'au bout. Ma tante m'a vu naitre, moi je vis sa mort.
Voilà son cerceuil qui s'enfonce dans le sol. Je soutiens ma grand mere qui a du mal a rester debout. Je m'approche de la tombe et j'envoi une rose sur le cerceuil, ainsi qu'un morceau de terre, je ne sais pas pourquoi, mais c'est l'usage. Une centaine de personnes en fait autant. Je n'attend pas tout le monde, je quitte les lieux avec ma famille proche.
Le lendemain, avant mon depart je passe au cimetierre.
J'y vois mon oncle, cousin, cousine. Ils mettent en place les couronnes de fleurs, les plaques, lisent les mots des proches.
Je les quitte. Je rentre. J'ai l'impression d'avoir été acteur dans un film.
S'en suivra une longue période pendant laquelle j'ai porté le deuil, regardant les nombreuses cassettes de fetes familiales que l'on a pu filmer pendant x années. Me rendant en province le plus souvent possible pour notamment me receuillir sur la tombe. C'en est allé jusqu'au conseil concernant la pierre de la scepulture, le choix des caracteres, des dates, 1951-2003, des ornements, croix avec une rose, ou un epi de blé???
C'en devenait morbide... Mon cousin de 25 ans et ma cousine de 29 ans organisaient la tombe de leur mère... Inconcevable dans mon esprit ... mais tellement réel pour eux. Impossible pour eux de leur remonter le moral, impossible de parler de leur mere avec eux. Tout cela etait trop frais. Trop tôt.
Cela peut vous parraitre bizarre que je vous fasse part de ce vécu, sur une page de "blog", mais c'est un peu un moyen d'exorciser ce que j'ai pu ressentir a ce moment là, et qu'il m'arrive encore de ressentir de temps a autre.
Cela peut vous parraitre trop personnel, impudique d'etaler ainsi des sentiments, mais je vous retorquerai, si vous avez lu l'intégralité (vous êtes courageux!), que chaque personne vit un jour ou l'autre la meme douleur. Ce jour là, j'ai compris que si l'on est 6 à une table, il y a de fortes chances qu'un des 6 vive le décès des 5 autres... Jamais je n'ai eu conscience de cela avant. Aujourd'hui je le sais. C'est pour cela que je m'efforce de vivre le plus possible à coté de ceux que j'aime et de profiter au maximum des petits moments de bonheur que la vie nous offre.
Reste que la date du 23 fevrier, auparavant festive a à ce jour un goût d'amertume....